Yémen : Retour sur l’atelier du 29 et 30 septembre

Actu du 24/11/2025

Alors que le Yémen demeure l’un des pays les plus vulnérables au changement climatique, marqué par une raréfaction extrême des ressources en eau et une dégradation accélérée des terres, la Rural Youth Cooperative for Agricultural Development (RYCAD) a organisé les 29 et 30 septembre 2025 un atelier national dédié à la lutte contre la désertification et l’adaptation à la sécheresse. Cette rencontre, articulée entre une première journée en ligne et une session en présentiel à Taiz, s’inscrit dans la dynamique internationale Desertif’actions 2026

Réunissant un total de 31 participantes et participants, issus d’organisations paysannes, de services techniques, d’universités, de collectivités et d’organisations communautaires, l’atelier a permis de dresser un bilan partagé de la situation et surtout de co-construire des pistes d’action opérationnelles pour renforcer la résilience des communautés rurales face à des sécheresses plus longues, plus fréquentes et plus sévères. 

Yémen : une vulnérabilité structurelle à la sécheresse 

Avec plus de 90 % du territoire en zones arides ou semi-arides, une agriculture fortement dépendante des pluies et des nappes phréatiques, et une pression croissante sur les terres, la sécheresse est devenue une crise systémique. Les participants ont rappelé des chiffres préoccupants : 

  • des ressources renouvelables d’à peine 83 m³ d’eau par habitant et par an
  • près de 90 % des prélèvements en eau destinés à l’agriculture, 
  • une surexploitation aiguë de certaines nappes, comme celle de Sana’a, où les extractions dépassent de plus de quatre fois la recharge naturelle. 

Ces tensions hydriques se doublent de dégradations des terres, d’un recul des pâturages, de conflits d’usage et d’un effondrement d’infrastructures traditionnelles telles que les terrasses de montagne. 

Un atelier en deux temps : diagnostic partagé et identification de solutions 

Jour 1 (en ligne) 

Cette première session a posé les fondations d’un diagnostic partagé, en parcourant : 

  • l’état de la désertification au Yémen ; 
  • les mécanismes biophysiques et sociaux aggravant la sécheresse ; 
  • les impacts observés sur l’agriculture, le pastoralisme et la sécurité alimentaire ; 
  • les engagements du pays dans les cadres internationaux (UNCCD, NDC, plans d’adaptation). 

Les participantes et participants ont été répartis en trois groupes, correspondant aux trois axes de réflexion de l’atelier : 

  1. Transformer l’agriculture irriguée et pluviale face à la sécheresse
  1. Gérer durablement les ressources en eau à l’échelle des bassins versants
  1. Mieux protéger et restaurer les terres agricoles et pastorales

Chaque groupe a produit une première analyse des problèmes, opportunités, acteurs clés et indicateurs pertinents. 

Jour 2 (en présentiel, à Taiz) 

La seconde journée, en présentiel, a permis de transformer ces diagnostics en paquets d’interventions concrets, élaborés autour d’exercices collaboratifs : 

  • séances de co-construction, 
  • revue croisée entre groupes (“galery walk”), 
  • priorisation selon une matrice impact / faisabilité, 
  • élaboration d’un premier plan de route national. 

Des constats partagés : sécheresses plus longues, appauvrissement des sols et pressions accrues sur les ressources 

Les groupes ont souligné plusieurs tendances préoccupantes : 

  • baisse marquée de la productivité des cultures et hausse des pertes post-récolte ; 
  • recul des pâturages et flambée des prix des fourrages ; 
  • recours croissant à des puits profonds, alimentant une spirale de déplétion des nappes ; 
  • intensification des conflits liés à l’eau, aux pâturages et aux terres agricoles ; 
  • vulnérabilité accrue des femmes, des petits agriculteurs et des pasteurs mobiles ; 
  • multiplication des chocs simultanés : sécheresse, chaleur extrême, vents chargés de poussières et inondations soudaines. 

Etat des lieux des pratiques éprouvées et solutions locales 

Les participants ont mis en avant un ensemble de pratiques locales ayant fait leurs preuves : 

  • collecte des eaux de pluie (citernes, petites diguettes, check-dams) ; 
  • entretien régulier des terrasses agricoles
  • irrigation économe (goutte-à-goutte, irrigation déficitaire contrôlée) ; 
  • rotations culturales flexibles et variétés tolérantes à la sécheresse
  • services vétérinaires communautaires mobiles
  • comités locaux de l’eau pour organiser les tours d’irrigation et réduire les tensions ; 
  • information climatique par SMS mobilisant les jeunes pour la collecte de données. 

Priorités d’action définies par les participants 

À l’issue des discussions, quatre blocs d’intervention majeurs se dégagent. 

1. Eau et irrigation 

  • appui à la création d’associations d’usagers de l’eau ; 
  • déploiement de matériaux et de techniques d’irrigation efficients et formation locale à l’entretien ; 
  • réhabilitation de petits canaux, diguettes, barrages de rétention ; 
  • mise en place de points de mesure des niveaux de nappes et de suivi des prélèvements. 

2. Élevage et services pastoraux 

  • création de banques fourragères villageoises ; 
  • amélioration des points d’abreuvement (ombrages, abreuvoirs, haies brise-vent) ; 
  • renforcement du réseau de CAHWs (agents para-vétérinaires communautaires). 

3. Services climatiques et digitalisation 

  • lancement de SMS d’alerte agricole et pastorale alignés sur les calendriers locaux ; 
  • mobilisation de la jeunesse pour la collecte de données agroclimatiques. 

4. Financement et protection sociale 

  • extension des programmes cash/food-for-assets pour l’eau et la restauration des terres; 
  • expérimentation d’assurances indiciaires sécheresse et de micro-financements saisonniers. 

Retrouvez l’intégralité des recommandations dans le compte rendu complet de l’atelier (en anglais).

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